vendredi, avril 19, 2024

La lettre COMB LAB : Jeunes gens d’aujourd’hui…

« Les jeunes d’aujourd’hui sont les acteurs de demain ». Balayons ce truisme d’un revers de main non sans avoir porté attention à quelques inaperçus que cache sa superficialité.

Dire ‘’Les jeunes’’, n’est-ce pas prétendre contenir dans une unique classe – d’âge en l’occurrence – des individus supposés homogènes et indifférenciés ? Une telle licence langagière doit rester circonscrite au parlé quotidien. Elle est pulvérisée dès que la raison interroge les motifs de ranger dans un seul sac les jeunes générations. La vie est d’abord diversité. Le déni de cette réalité sous-tend les discours qui saturent l’actualité, renforce le tropisme latent de la simplification ; terreau idéal des impasses de la réflexion sociale et donc aussi politique.

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Pour qui veut que les jeunes gens d’aujourd’hui deviennent les acteurs actifs de demain, il convient de considérer les parcours individuels plutôt que l’âge. Albert Jacquard (1925 – 2013) notant que le logarithme de 10 est 1 et celui de 100 est 2, en déduisait qu’un enfant de dix ans « a vécu intérieurement la moitié de ce qu’il aura vécu lorsqu’il sera centenaire1». Que cela soit ou non transposable à l’intensité de la vie psychique, l’intérêt de cette assertion tient à l’introduction d’une bifurcation de la pensée qui coupe court à la réduction ‘’des jeunes’’ aux typologies de personnalités psycho-cognitives moyennées en fonction du seul nombre des années de vie.

Disposition favorable à un vécu intérieur intense et plasticité de la cognition, voilà deux caractères du jeune âge propices à la construction de capacités à raisonner de manière autonome. Chemin d’autonomisation dont, malheureusement, les jeunes femmes et jeunes hommes vivant en ruralité se croient parfois tenus à distance, convaincus de n’être ‘’pas calculés’’ dans la vie locale. C’est précisément ce pré-supposé qu’il convient de faire tomber. Tous détiennent précocement des savoirs implicites qu’il convient de transformer en savoirs explicites et conscients afin qu’ils déploient leurs capacités et se sentent ainsi aptes à intervenir dans les processus de résilience qu’ils devront contribuer à faire vivre.

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La conscience généralisée de l’ampleur des défis climatiques et environnementaux incline à penser que les compétences à la citoyenneté active, chez celles et ceux qui seront en pleine maturité au milieu du siècle, constitueront des ressources à forte valeur ajoutée. A condition toutefois que ces adultes, des années cinquante et au-delà, soient devenus des usagers informés et éclairés de l’internet. Ceci requiert la capacité de contourner les moyennisations de la pensée, du langage, et des décisions de la vie courante, élaborées par les algorithmes des plateformes qui gomment les singularités, donc la créativité. Œuvrer à la résilience collective nécessite de ne pas être sous influence des moyennes, renforce la pratique démocratique par la participation citoyenne et rassure aussi à l’échelle individuelle car l’action altruiste stimule le moral et la dignité. D’où la nécessité de mettre à disposition des jeunes gens d’aujourd’hui, les savoirs qui permettent de cultiver l’esprit de résilience collective.

Depuis une quinzaine d’années, les études confirment que nombre de jeunes gens s’impliquent ponctuellement dans le soutien de causes liées au respect des minorités, au refus des inégalités excessives, etc. Ces jeunes gens témoignent auprès des enquêteurs de leur volonté de participer à la construction de la ‘’société d’après’’. C’est la raison pour laquelle COMB LAB entend contribuer au développement de ‘’l’expertise usagère’’ des jeunes des Combrailles car « L’usagent est à la société du début du XXI° siècle ce que l’ouvrier était à la société du début du XX° siècle : son catalyseur de liens sociaux de production et de liens sociaux de solidarité. »2.

Aussi, conscients de la qualité des compétences dont les acteurs du milieu de ce siècle devront être pourvus, COMB LAB, avec ses partenaires, tient pour prioritaire l’acquisition par les jeunes gens des Combrailles des moyens renouvelés de décrypter les forces et faiblesses du nouveau monde en vue d’ouvrir demain des chemins de résilience encore impensables aujourd’hui.

La seule joie, la seule vraie vertu, c’est de comprendre.

Baruk Spinoza (1632 – 1677)

L’Éthique

1 Albert Jacquard, avec la collaboration d’Huguette Planès, Nouvelle petite philosophie Stock 2005, P. 121

2 Claire Heijbœr L’expertise usagère Revue Esprit n° 466 – juillet août 2020. P. 125.

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