jeudi, avril 25, 2024
Nos valeurs

Vers les Combrailles du XXIe siècle

Contexte.

Les Combrailles, situées au-delà des périphéries de la métropole clermontoise, entrent dans la catégorie de l’hyper-ruralité1. A ce double titre d’éloignement et de typologie des campagnes françaises, ce territoire est souvent réduit dans les imaginaires à une série de handicaps, lui ôtant toute perspective de développement. Mais cette approche a-t-elle encore toute sa pertinence aujourd’hui ? Les contenus sémantiques de « ruralité », « territoire » et « développement » sont-ils restés figés ces dernières décennies ?

Diagnostic.

Le risque majeur pour un territoire réputé sans enjeu, donc déclassé, tient à l’affaissement progressif de la démocratie locale. En effet, les grands défis du siècle – le changement climatique, la numérisation généralisée, la question énergétique, la crise économique et l’explosion du chômage suite à l’épidémie – font trop souvent l’objet d’approches dualistes et de décisions centralisées, parfois irréversibles, sans égard pour les spécificités locales.

Problématique.

Comment amortir la convergence des chocs

climatique, technologique, énergétique, sociétal, de sorte

que la parenthèse démocratique ne se referme pas en Combrailles.

Hypothèse.

Ce diagnostic étant posé et après consultations d’acteurs du territoire, de spécialistes des questions liées aux défis du XXIe siècle pour la ruralité, en s’appuyant aussi sur une documentation profuse, COMB LAB avance l’hypothèse que la mise en œuvre au plus tôt de processus innovants dans les domaines de l’agriculture, de la technologie de pointe, de la socio-économie, constitue LA clé pour que les Combrailles prennent rang parmi les territoires aptes à affronter les défis du XXIe siècle dans les meilleures conditions.

  • L’agriculture.

Au passage d’une agriculture traditionnelle à une agriculture industrielle, initié par la réforme agricole de 1960 / 1962, se sont ajoutés de nouveaux modes de pensée et de vie introduits par la nouvelle population rurale. L’addition de ces facteurs a progressivement isolé l’agriculteur de la société rurale, le positionnant en exploitant mécaniste à l’extérieur du groupe des habitants vivant sans la campagne environnante.

Tenant compte des inquiétudes de plus en plus prégnantes des agriculteurs quant aux nouvelles conditions climato-agricoles, des changements de comportements alimentaires à l’échelle internationale, de l’augmentation de la concurrence internationale et, prenant aussi en considération les recherches d’approvisionnement en circuits courts d’un nombre croissant de consommateurs, COMB LAB avance l’hypothèse que cette convergence de critères objectifs marque la nécessité de ‘’re-liaison’’ de l’ensemble de la population rurale : nouvelles populations rurales, agriculteurs et autres acteurs.

Produire en portant attention à la permanence de la fertilité des sols et au bien-être des animaux, transformer localement et entretenir des relations commerciales et sociales avec les populations de proximité (ruraux, néo-ruraux, périurbains), rend visibles les compétences métiers et garantit sur la longue durée la dignité des agriculteurs.

  • La technologie.

Les populations technologiquement les plus avancées ont mieux traversé la longue et difficile révolution néolithique que les autres groupes humains. Aujourd’hui, les sommes colossales investies dans les technologies pour le contrôle de l’information et des données, confirment la valeur stratégique de la maîtrise des technologies de pointe pour avoir (en partie) la main sur l’avenir.

Attentif au fait que les énormes capacités de calcul des algorithmes ne doivent pas faire oublier que « calculer n’est pas penser », COMB LAB avance l’hypothèse de la pertinence d’une politique locale de développement technologique pour garder le contrôle des compétences métier, le contrôle des compétences sociales, la maîtrise du ‘’savoir-innover’’ ; en un mot : éroder l’isolement social des internautes et créer du commun pour que tous et chacun contribuent à la démocratie locale.

Sans empiéter sur le foncier agricole – grâce à la miniaturisation des composants électroniques – l’installation en Combrailles de jeunes ingénieurs attentifs à la qualité de vie et désireux de donner un sens à leur vie professionnelle permet d’avancer dans la maîtrise des processus numériques en rapport avec la vie locale.

  • La socio-économie.

Positionner l’agriculteur au centre de la société rurale et développer des technologies de pointe pour servir la vie locale Combrailloise, tels sont de nos jours les axes majeurs d’enrichissement et d’épanouissement de la sociabilité au sein du territoire.

COMB LAB fait l’hypothèse de favoriser et amplifier les processus de démocratie locale par 1) une citoyenneté ouverte en mettant à la disposition de tous des informations contrôlées et recoupées pour une résilience territoriale face aux grands défis du siècle, 2) en assurant l’accompagnement du changement dans les domaines de l’après-pétrole, du stress hydrique, etc., 3) en innovant constamment pour produire des communs dans des domaines tels que l’intelligence artificielle, les biotechnologies, les nanotechnologies au bénéfice de nos vies individuelles et collectives.

En résumé, l’hypothèse présentée par COMB LAB vise à entraîner un nombre critique d’acteurs du territoire dans la mise en œuvre de la transition globale – environnementale, énergétique, technologique, agricole, sociale, économique – pour détourner résolument les Combrailles du risque de déclassement et hausser notre territoire parmi les créateurs d’un XXIe siècle technologique, climato-résilient, humaniste, démocratique.

Travaux en cours.

Les restrictions liées à la crise sanitaire ralentissent sérieusement la dynamique décrite ci-après.

1/ Le volet agricole

COMB LAB pilote depuis l’automne 2019 le groupe informel ‘’Laboratoire d’Idées’’ composé de personnalités du territoire et de deux associations : Alterna Comb qui agrège une trentaine d’agriculteurs bio et/ou en transition, répartis dans les trois communautés de communes des Combrailles et le Greffe (GRoupe sciEntifique de réFlexion et d’inFormation pour un développement durablE) composé de scientifiques (INRAE – CNRS).

Visée des travaux engagés :

  • Infiltration des eaux pluviales.

Tandis que les processus d’assèchement s’additionnent (canicules, vent, diminution des cumuls de pluies) et que les modélisations climatiques pour les années à venir ne laissent pas espérer d’amélioration, il est essentiel de capter l’eau de pluie pour qu’elle s’infiltre dans les parcelles (cultures et prairies en herbe) sans en priver les zones urbaines de l’aval du massif combraillois. Pour éviter l’écoulement direct des eaux pluviales dans les fossés et ruisseaux, il convient d’implanter dans les parcelles des rigoles d’infiltration suivant les courbes de niveau. Télécom-Physique Strasbourg se propose de mettre au point un appareil de géo-guidage de tracteur selon les courbes de niveau.

  • Agroforesterie. 

Les retours d’expériences confirment depuis des décennies que l’agroforesterie constitue un processus d’élection pour le maintien des cultures et de l’élevage en zones semi-arides et arides. Compte tenu des projections climatiques en Combrailles pour les décennies qui viennent, il convient de sélectionner des essences d’arbres pour les haies agroforestières, des semences culturales et des herbages qui résistent à la semi-aridité tout en prenant soin de ne pas polluer génétiquement les sols par l’implantation d’espèces issues de biotopes chimiquement trop éloignés du biotope combraillois. Le Greffe pilote ces travaux.

Au fur et à mesure de leurs développements, ces travaux seront testés en pleine terre puis évalués par les agriculteurs d’Alterna Comb dont les parcelles d’expérimentations auront aussi un rôle pédagogique pour témoigner auprès des agriculteurs conventionnels environnants des rendements obtenus par l’agroforesterie en regard aux économies d’énergie et à la préservation de la trésorerie de la ferme.

Trois groupes de travail se sont constitués autour de ces thématiques :

  • Eau – sols – arbres – haies- herbages ; un tout indissociable pour reconstituer du bocage.
  • Agriculture familiale, résiliente, itérative.
  • Vers une agriculture circulaire en Combrailles.

2/ Les exécutifs locaux

  • Comb Lab a rencontré durant l’automne 2020 les exécutifs des Combrailles récemment élus et divers acteurs du territoire.

3/ Le volet social du programme COMB LAB

  • Une convention entre COMB LAB et le Cisca (Centre d’Innovations sociales Clermont Auvergne) scellera le partenariat, conclu fin août entre les deux structures. Le Cisca lance un programme de résilience territorial2 auquel Clermont Auvergne Métropole et un chapelet de collectivités situées sur le flanc Est des volcans jusqu’au Sancy ont d’ores et déjà souscrit.

Huit doctorants et trois chercheurs, tous spécialistes des diverses disciplines des sciences humaines, vont travailler avec les organisations (collectivités, initiatives citoyennes, associations, etc.) des territoires cités. S’agissant des Combrailles, COMB LAB est désigné comme interface entre le Cisca et les organisations des trois communautés de communes.

Le début de l’année 2021 sera marqué, sous réserve de la levée des restrictions liées à la crise sanitaire, par :

  • L’installation d’un groupe de travail dédié à la (re)sociabilité de l’agriculteur.
  • La mobilisation d’élèves ingénieurs pour concevoir un programme propre à constituer du commun pour la sauvegarde et le partage des savoir-faire agricoles.
  • L’entrée en relation avec les industries, PME, PMI et autres entreprises locales pour déployer au premier semestre 2021 le pilier haute technologie & industrie du programme Comb Lab.

L’association COMB LAB, s’est constituée à partir du diagnostic énoncé plus haut et avec la conviction qu’une initiative de la société civile menée en coopération avec les élus de proximité produit des résultats bénéfiques pour le territoire et contribue à la démocratie locale.

Depuis la survenue de l’épidémie de coronavirus, nous renforçons l’agilité de nos méthodes pour coller au plus près des évolutions économiques et sociales du territoire.

Tous nos programmes sont encadrés par une veille prospective systémique, un constant questionnement éthique et une attention particulière portée aux freins aux changements.

1 Cf. le rapport « Hyper-ruralité » du sénateur Alain Bertrand et remisle 30 juillet 2014 au gouvernement. Disponible à la Documentation française :

2 Recherche et développement sur une résilience opérationnelle et transfert opérationnel des expériences de changement réussies sur le territoire.