vendredi, décembre 6, 2024

La Lettre COMB LAB : De l’urgence d’agir à l’agir dans l’urgence

Janvier 2022

L’ouverture, en Belgique, d’un processus pour « Une reconnaissance mondiale du crime d’écocide »1 traduit l’exaspération d’une part croissante de la population mondiale scandalisée par l’incurie des acteurs économiques et des dirigeants politique face à l’accélération de la détérioration de la biosphère. Tandis que Les alertes du GIEC disent le niveau de danger, les activistes de mouvements tels que Youth for climate perçoivent les risques de l’irréversibilité. De leur côté, les plus grandes banques européennes jouent le nihilisme en enrichissant leurs bilans d’actifs fossiles… donc pourris2.  En clair, la société civile doit agir d’urgence pour ralentir, voire faire cesser, la destruction systématique de la biosphère.

Mais l’objectivation de l’urgence d’agir ne dit rien des conditions d’agir dans l’urgence.

Dans un texte aussi court qu’éclairant des années quatre-vingts, André Leroi-Gourhan3 pose que les évolutions anatomiques des organismes vivants répondent non pas à un développement biologique linéaire et endogène des organes et des systèmes organiques, mais aux nécessités fonctionnelles vitales : se nourrir, se déplacer, ouvrir une coque d’oléagineux. Et, plus tard, les dispositifs techniques ont externalisé les compétences humaines, démultipliant la force musculaire, permettant le transport des personnes et leurs marchandises ou la fonte des métaux à très haute température, etc. L’auteur note opportunément que « de toutes les activités humaines, la technique est la seule qui ne revienne jamais à son point de départ ». La trajectoire aboutit à « L’électronique (qui) franchit la limite sacrée de la pensée intellectuelle et l’on peut parler, au sens propre, avec des machines qui pensent et qui, maîtrisant totalement l’instruction qu’on leur imprime, pensent plus vite et plus juste qu’un cerveau humain. Il n’est que fort naturel qu’une certaine angoisse se glisse dans le dialogue entre le robot et un homme dénudé de tous ses mystères. »

Cette plongée dans la frise des millénaires qui nous mène aux technologies contemporaines aide à penser les conditions de l’action dans l’urgence aujourd’hui au beau milieu de la fonte des glaces polaires et des cyclones en plein hiver. Le sauve-qui-peut face au changement climatique qui ne laisse pas de seconde chance ne doit surtout pas évincer une contextualisation de nos actions pour atténuer les dégradations de notre environnement. En effet, les dommages de grande ampleur du climat se trouvent conjoncturellement accompagnées de deux autres phénomènes de même ampleur bien qu’autonomes : la numérisation incontrôlée de la vie humaine et la négligence des politiques éducatives des jeunes générations qui gouverneront le monde dès le milieu de ce siècle.

C’est la raison pour laquelle COMB LAB en coordination avec ses multiples partenaires oriente, pour l’année 2022, ses travaux vers cette triple exigence : permettre aux jeunes ruraux des Combrailles d’accéder à des connaissances scientifiques (volet informationnel et éducatif) pour devenir des usagers informés et éclairés du numérique (sortir de ‘’ l’angoisse glissée dans le dialogue entre le robot et un homme dénudé de tous ses mystères’’) pour agir d’urgence (avec les autres acteurs de la transition climato-énergétique) pour le climat dans des conditions d’urgence raisonnée. Séparer ces trois instances encouragerait l’aveuglement des sphères dirigeantes. Le programme détaillé sera prochainement mis en ligne sur notre site.

En résumé :

La fonctionnalité contrainte par les pressions de l’environnement, naturel et technique guide l’adaptation sélective.

Pour cette raison, COMB LAB souhaite à ses lectrices et lecteurs d’œuvrer là où ils se trouvent pour que 2022 devienne une année de bascule pour les trois instances en urgence systémique :

le climat, la jeunesse, l’humanisation du numérique.

1 https://www.novethic.fr/actualite/environnement/pollution/isr-rse/ecocide-150414.html?utm_source=AlertesThematique&utm_campaign=17-12-2021&utm_medium=email

2 https://institut-rousseau.fr/actifs-fossiles-les-nouveaux-subprimes/

3 André Leroi-Gourhan Technique et société chez l’animal et chez l’homme. Dans Le fil du temps, Ethnologie et préhistoire Points sciences 1986.

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